Bloguer ou ne pas bloguer?

Chez TheGirlNextDoor j'ai lu son article sur le roman BLOG.

"Blog, c'est l'histoire d'un adolescent révolté par le fait que son père ait secrètement pris connaissance de son blog et d'informations intimes à son sujet. Mais au lieu de chercher à se confondre en excuses, le père, qui s'est facilement laissé démasquer, va à son tour dévoiler une partie de son passé à son fils, lui laissant sans un mot un carton rempli de ses carnets intimes.

Un livre sur la filiation et l'écriture intime."


Je blog depuis maintenant à peu près 11 ans, je suis passée par tous les stades et donc hébergeurs (qui à l'instar des radios ou chaînes tv correspondent à certaines tranches d'âges et intérêt), skyblog, bloxode, over-blog, cowblog et blogspot. J'ai appris par grand hasard que mon père visitait mes blogs. A l'inverse de ce roman je ne me suis pas sentie violée ou atteinte dans mon intégrité. La surprise s'est tout de suite transformée en honte, sur ce que je racontais d'intime ou blessant à l'égard de ma famille ou de lui. J'ai commencé à me censurer et puis j'ai renoncé à cette démarche plus qu'hypocrite. Après tout, il n'avait pas changé de comportement envers moi pour autant ni fait d'intrusion gênante (cf Facebook et les mamans qui postent des longs mots d'amours bien dégoulinant).

Il fallait bien que j'assume de toute façon, Internet est ouvert à tous, sans distinction. Pourquoi pas lui? 

Cela m'a amené à réfléchir sur l'anonymat du net et ce mouvement du blog, qui devient une sorte de passage obligé pour cette nouvelle adolescence sans limites outre celles du numérique. Comment gérer cette intimité anonyme qui se déferle sur l'estrade mondiale de l'Internet ? Comment la comprendre ou ne pas la comprendre? 
Je suis née en même temps qu'Internet, j'ai donc grandi avec son évolution, j'ai découvert Facebook à l'âge où cela m'apparaissait utile (fin du lycée) puisqu'il avait été conçu par des personnes de ma génération. Et ses outils et plate-formes ont suivi mon besoin d'évolution et de nouveauté. J'ai troqué mes carnets pour les blogs. 
Mais ceux qui me suivent sont nés avec Internet, ils vivent avec une normalité quotidienne de ce monde sans frontière (que l'on croit, mais c'est un autre débat). Et qui du simple journal papier planqué sous l'oreiller passe de la chronique anonyme postée sur un mur géant à la vue de tous.

Lorsque je dit "hypocrisie" je ne le mentionne pas à la légère, vouloir fermer sa chambre à ses parents lors de la puberté est normal mais ouvrir sa fenêtre de bureau virtuel à l'inconnu mondial puis s'indigner que nos connaissances y aient accès par la suite n'est-ce pas de l'hypocrisie ? 
Pour une génération informée et consciente oui. Mais pour celle qui arrive, où s'afficher et faire le buzz relève du quotidien, doit - on instaurer une nouvelle forme de protection ? Ou laisser faire et considérer ce passage comme un apprentissage qui comme tout enseignement comportera des erreurs ? (suicides en lignes, le viol public par web-cameras interposées ?)

Mon propos comporte une radicalité volontaire et tout est sujets à nuances. La question à se poser n'est pas réellement comment gérer la transparence du mur de l'écran mais bien pourquoi ce besoin est né ? Est-ce une simple évolution parallèle à celle de la technologie ?

Après tout, l'adolescence n'est qu'une quête d'identité, le look provocateur (qu'il soit gothique ou fashion-girly), les pierçings, tatouages, couleurs de cheveux, les contestations (prisées en public ou en famille) et les manifestations dans la rue (grèves ou rassemblement mineurs dans les parcs pour fumer ou boire) ne sont que d'autres (ou d'anciens) moyens de s'afficher, de se confronter au monde. La plateforme du net l'a juste agrandi. Et le blog permet via un anonymat hypocrite ce que les cours de récrés permettaient auparavant, la confrontation, la comparaison, la conciliation et la contestation à plus grande échelle. De s'inventer un monde plus grand renonçant à la marelle pour un manège numérique, le phénomène geek/nerds/no-life fait partie intégrante de ce questionnement.

La question reste posée, comme une énième parole numérisée.

Commentaires

  1. Je me permets après avoir bien lu ton article d'apporter la nuance à laquelle tu fais allusion dans ton texte ^^
    La question de l'anonymat se pose toujours lorsqu'on évoque la nécessité de se confronter à l'autre sur internet (et je raccourcis un peu ton propos)mais je pense que ton ouverture sur le phénomène "geek" est en mesure d'apporter une vraie réponse à ce que tu définis toi comme "une hypocrisie".
    Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un anonymat hypocrite. Ca va beaucoup plus loin que cela et ça rejoint ton idée sur la quête d'identité. A mon sens cet anonymat est bien plutôt une forme d'affirmation de soi. Mais exacerbée - d'une même genre que le schéma adolescent. Ce qui en soi, est symptomatique de nos sociétés postmodernes individualistes. Ce qui en jeu là dedans, c'est de se lire au travers d'avatars. L'ami des livres ou du journal intime laisse sa place à l'ami des jeux vidéo, des blogs, des forums et que sais-je encore. Le principe même de réalité cède le pas à une fantasmagorie vécue et le fantasme l'emporte sur l'esprit de sérieux. On juge bien souvent la communauté des arts ludiques tel que le jeu vidéo comme un phénomène asocial, coupé du monde - en un sens, il l'est. Mais réfléchissons. Ne sont-ce pas là des sociétés secrètes, ou petites tribus s'articulant en réseaux et qui, par sédimentations successives élaborent un être-ensemble postmoderne ? Dans ces systèmes, n'est-il pas question de créer du lien - même si celui ci n'est pas réel ? Il y a dans le virtuel, comme le dit si bien le philosophe Michel Maffesoli, de "l'hyperréel". Il y a une espèce de complétude à jouer des rôles multiples. Nous jouons tous des rôles, ne l'oublions pas. Le labyrinthe du vécu est pluriel. Aussi le blog rappelle-t-il une chose simple : l'important n'est pas d'exister par et pour soi-même, mais sous et par le regard de l'autre. C'est l'autre qui décide ce que nous sommes. Et c'est cela, en gros, qui dérive vers ce qu'un autre philosophe, Hiroki Azuma, japonais cette fois-ci, définit comme un "narcissisme tribal".
    Est-ce réalité ou simulacre ? La question est ouverte =D

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  2. J'ai entendu vos propos mais je doit avouer que j'ai une vision des choses d'avantage basée sur le plan Humain et beaucoup moins sur le plan Sociétal. Je suis surpris de ne pas voire parler de protection lorsqu'il s'agit d'anonymat. L’anonymat ne serait-il pas tout simplement la protection de son identité? Cela reviens au même que l'enfant se cachant dans les jupes de sa mère. Tant qu'on ne sais pas qu'il est là, qu'il est réellement là, j’entends, il est en sécurité.

    Nous sommes d'accord pour dire que l'adolescence est une perpétuelle recherche d'identité et que c'est à cet age là qu'on se défini, à soit comme aux autres, mais pour les gens des générations X et Y, comme on les appel, l'ouverture aux particuliers du web et la liberté totale qu'il implique est arrivé à ce moment là.

    Je pencherai donc d'avantage pour une évolution parallèle à la technologie car le besoin à toujours été là.

    Ce nouveau moyen de communication est devenu un moyen de s'afficher non seulement dans la cours de récréation mais également dans le monde entier ou comme tu le dis, à plus grande échelle. Comment ne pas se laisser charmer par une telle liberté d'expression, quand on est adolescent? Quel intérêt de raconter sa propre vie à un journal intime qui n'est connu et lu que par soi-même?

    C'est bien plus grisant de raconter sa vie à tout ceux qui veulent l'entendre! Et puis honnêtement, à cet âge là, on pense de nos parents qu'ils ne sont pas capable de se servir d'un ordinateur. Et même si c'était le cas, notre mode de penser est bien trop compliqué pour eux et ils sont trop habitué au papier. Comment pourraient-il se douter que nous donnons des détails intimes de notre vie sur internet? Cela aide dans le processus de recherche de soi car l'anonymat permet de raconter des détails intimes sans pour autant risquer de jugement ou de critique de la part des autres, ou plutôt cela laisse la possibilité de ne plus en tenir compte.

    Mais tout cela n'est plus possible dès lors qu'un proche entre dans cette sphère d'inconnu. La critique devient possible, le jugement aussi, et l'origine de tout ce qui est affiché sur ce mur géant devient connue. L'anonymat publique donne une sensation (peut-être faussée) de sécurité qui se retrouve violée quand on se rend compte qu'il n'est plus, alors je pense qu'on s'indigne par honte d'avoir été découvert plus que par narcissisme ou par hypocrisie.

    Pour ma part, à mon âge (24 ans) je me considère (presque) comme adulte, mais pourtant je continue d'usé de l'anonymat publique que j'utilise comme outil pour tenté "d'effacer" mon passé qui ne me plait plus, afin de recommencer une nouvelle "vie virtuelle" sur de nouvelles bases. Une façon d'asseoir le "nouveau moi" comme étant l'aboutissement de ces années de recherche d'identité qui ont précédé.
    Et si j'utilise ce processus, c'est par simple manque de confiance en moi. Conserver un anonymat me permettrai de disparaître au cas où cette nouvelle réalité virtuelle ne me conviendrait plus, ce qui ne serait pas possible si je signait mes pensées et mes écrits par mon propre nom.

    D’ailleurs, n'est-ce pas également ce que tu as fait en ouvrant ce nouveau blog qui se veut "plus intelligent" que l'ancien?

    En bref, cela rejoint autant l'idée du jeu de rôle que celle de la recherche d'identité mais à ce moment là, on peut se demander jusqu'à quel âge ou combien de fois peut-on recommencer ce manège. Et surtout: est-ce que c'est le moyen le plus efficace pour arrivé à se définir?

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  3. :)
    Moi j'ai peur que mon entourage proche tombe dessus... Parce que je dis trop de choses que je n'ose pas leur dire à eux, que j'ai peur qu'ils voient ce côté de moi qui n'est pas toujours positif.
    Parfois le papier me manque, mais je préfère les correspondances en matière de papier finalement.

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