Helvetios - Eluveitie
Scénariste : KANSARA Simon, FERT Stéphane
Coloriste :
FERT Stéphane
Illustrateur :
FERT Stéphane
Collection :
MIRAGES
Privée de son destin de reine, la demi-soeur du roi Arthur devient la sulfureuse fée Morgane et se dresse contre la tyrannie de la Table ronde et les manipulations de Merlin le fou. Écœurée par le magicien qui joue avec sa vie depuis sa plus tendre enfance, Morgane laisse libre cours à sa colère et assouvit sa soif de pouvoir envers et contre tous : son ancien maître, les hommes, leur nouveau dieu unique et l'ordre établi…
Dans mes pérégrinations arthurienne, on
connaissait déjà ma passion pour la mythique Morgane La Fée,
figure féminine et païenne qui aura fait couler de l'encre et du
sang chrétien. Image d'une croyance décadente, perverse et
hérétique aux yeux du tout naissant Christianisme, elle est la
protagoniste rivale du Roi Arthur, le combattant et l'entraînant
dans les voies perfides de l'inceste… (Il sont frère et sœur de
par leur mère Ygerne de Tintagel, leur fils Mordred sera son
assassin.)
Ce que la légende ne raconte pas, cette
belle bande dessinée se propose de l'illustrer. L'illégitimité
d'Arthur et l'injustice d'un pouvoir refusé à Morgane. Le fruit
d'une misogynie profonde plutôt qu'une vraie mésentente des fois et
croyances ?
Venez donc assister au fond des pages
aussi sombres et ténébreuses que la beauté ensorcelante d'une
sorcière moins avide de pouvoir que de reconnaissance.
Le récit
prend le parti de Morgane, née princesse et élevée par son père
en vue d'être reine. Elle manie l'épée et le combat, contre l'avis
de la cour, sous la bienveillance d'un père encourageant. Oui, il y
a du féminisme
(ouh le gros mot d'actualité) dans ce récit. Mais il faut parler de
la notion d'injustice et de vengeance qui teinte la légende de
Morgane La Fée.
Ce n'est pas l'histoire d'une féminité
bafouée, c'est l'histoire d'une héritière assassinée, qui revient
sous la forme d'un outil de machination d'un Merlin Fou. Perverti par
la soif de magie et amoureux d'une créature qui use de charmes et de
son corps. Il devient l'image d'un Diable presque trop satanique pour
être l'image d'une croyance alternative.
C'est une histoire de revanche et de
vengeance. D'une enfant qui deviendra femme. D'une princesse qui
deviendra sorcière puis reine. Usant des outils imposés par ses
bourreaux, elle libérera Guenièvre de l'emprise d'un Arthur
arrogant et sadique. C'est une veuve noire qu'on ne peinera pas à
faire son alliée, car elle saura brisée la toile qu'on a tissé
autour de son existence.
Le
dessin est sombre, presque froid, avec pour seul contraste le blanc
contre le noir, le rose contre le bleu dans un violet nuancé. Si on
aime le jeu des couleurs sémantique (le bien le mal, le féminin le
masculin), on adore l'évolution des nuances qui hypnotise et
brouille toute frontière. Entre les personnages, entre les genres,
entre la forêt et les humains, la magie et la guerre…
*
Cet article est à retrouver sur Les Editions du Faune
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